Fédération-Unie

Le Secrétaire au Commerce fit son entrée, et à peine son nom annoncé, des dizaines d'invités se retournèrent pour voir de leurs propres yeux l'imminence du désastre, et beaucoup commencèrent à se déplacer pour y échapper - Luke Glassberg s'était bien vengé en lui faisant une réputation au Congrès.
Il chercha d'abord celui qui lui succéderait au Commerce, ce fameux Cameron Roberts dont tout le monde parlait tant dans son Secrétariat. Il l'aperçut près de son ancien emplacement et se précipita vers lui.

Aah, vous voilà donc, M. Roberts ! Bienvenue à Saint-Paul !

Il présumait en effet que Cameron Roberts, étant à moitié burghavinois, venait probablement tout juste d'arriver sur le territoire. Il prit un petit moment de silence pour l'analyser et déterminer si celui-ci était digne d'être son successeur. Il avait l'air aussi vieux que lui, le même regard vif, mais un air plus efféminé - pas de moustache et les cheveux probablement lissés au fer pour être aussi soyeux - mais il mettait ça sur le fait de ses origines saphyriennes.

Alors, euh.. Guten...Tag ? C'est bien comme ça qu'on dit dans votre langue, non ?

Norbert n'avait jamais vraiment réussi à distinguer les cultures phoéciennes les une des autres.

J'ai appris d'ailleurs pour votre pays... Il est dommage que vous ayez fait le choix de retourner à la monarchie, mais bon, c'est votre droit, on voit plein d'autres petits pays faire de même... Tous n'ont pas la chance d'être une aussi grande et solide république que nous ! Enfin bon, vous n'avez vraiment pas à vous inquiéter. J'ai entendu parler de votre roi, enfin empereur, enfin vous voyez là, comment s'appelle-t-il... Victor ? Ca doit être ça. Ca m'a l'air d'être un chic souverain, un pieux constantin, alors je suis sûr que ça ira bien pour vous. Mais j'espère quand même que vous n'oublierez pas où va votre loyauté, vous savez. Avoir deux pays, c'est bien, mais avoir la Fédération-Unie comme pays, c'est mieux.

Sa moustache frémissait de désapprobation.

De toute manière vous êtes mieux ici, pardonnez-moi mais le Burghaven, et ses politiques socialistes... Comme si le socialisme était ancré dans la culture saphyrienne. Rassurez-moi, vous n'êtes pas socialiste vous-même ? Enfin, vous nous sauverez peut-être un ou deux accords commerciaux. De toute manière, à part le thé et les rondins de bois, un bon saphyrien n'a pas besoin de grand chose pour vivre ! Et comme je le dis toujours...

Il s'interrompit en voyant que Meghan McCarthy, la fille du Président McCarthy et l'objet de sa fascination du moment, était présente un peu plus loin. Il fit une petite tape sur l'épaule de son successeur, puis se dirigea plus en bas de la tribune. Il fit un signe de la main à la fille de l'ancien Président, puis commença à bousculer tous les invités sur son passage pour accéder à la précieuse jeune femme.

Mademoiselle McCarthy, c'est un immense plaisir de vous retrouver ! Et un soulagement aussi, je dois dire que je n'avais pas vu autant de socialistes que depuis la dernière fois que je suis allé à un séminaire universitaire... C'est terrible de voir cette administration basculer à ce point dans le rouge ! Enfin, dans le bleu, mais le rouge socialiste, pas conservateur - m'enfin vous m'avez compris. Oh, milles pardons, j'ai oublié que vous avez été nommé... Secrétaire d'État, c'est bien ça ?

En réalité, Norbert savait très bien à quel Secrétariat elle avait été nommée. Il n'avait manqué aucun article de presse ni aucun portrait journalistique sur la nominée. Sa seule déception était qu'il n'ait pas pu siéger à une réunion du Cabinet avec elle.

Mais c'est normal. Votre prédécesseur, Paul Marshall, était aussi un indépendant. Il en faut, des gens comme vous, pour bousculer les choses, éviter aux extrémistes de prendre le contrôle de notre monnaie et de nos affaires étrangères... Et puis vous êtes un bon choix, une femme en plus ! La seule chose qu'il y a à craindre, c'est que vous voliez la vedette à la vieille Howard, avec un si joli minois !!

Rires gras et dégoûtants étouffés par une moustache.

Il se tourna ensuite vers le compagnon abasourdi de Meghan - dont il présuma, vu son physique et sa posture lui rappelant une théière, qu'il s'agissait de son bff gay comme disaient les jeunes.

Oh, bien ! Je vois que vous avez ramené votre meilleur ami homosexuel ! On m'a dit que c'est ce que font beaucoup de jeunes filles de nos jours. Vous savez, j'ai beaucoup évolué sur ces gens-là depuis que Bethany m'a emmené voir cette comédie musicale. Je comprends et j'accepte votre choix de vie, Monsieur, sachez-le !

Il lui adressa un sourire en lui serrant la main délicatement pour ne pas abîmer ce qu'il présumait être une main manucurée d'homosexuels.

Ma chère Meghan, sachez que ce fut un plaisir d'avoir pu vous parler. Vous savez, je connais bien votre père, c'est un bon ami, alors j'avoue que j'ai été déçu que nous n'ayons pas encore été présenté... Et pourtant je vous suis sur tous les réseaux sociaux - d'ailleurs, j'ai vu que vous n'aviez pas fait de même, je vous donne mon @ : NorfertbryantSecretary - j'ai fait une faute sur Norbert mais je n'arrive pas à la corriger... N'hésitez pas à reprendre contact, je ne serais sûrement pas loin. D'ailleurs, vous savez, je serai ravi de vous inviter dans mon ranch un jour ! Vous aimez le bull riding ? Je suis sûr que ça vous irait bien ! Vous avez le physique pour dompter ce genre de bestioles !

Il lui fit un clin d'oeil pendant que sa moustache remuait en suivant le sourire en coin qu'il tentait de faire.

Bien, je vous laisse, je vais retourner voir si quelqu'un n'a pas vu le Sénateur Glassberg, je souhaite m'entretenir avec lui de son laxisme sur la crise iyroéo-tawkirinaise. Ne changez pas ma jolie, tout le monde vous aime comme ça !

Il s'éclipsa ensuite, telle une ombre. Une ombre bruyante, qui bouscula encore une fois tous les gueux sur son chemin, semant la terreur dans la tribune officielle, comme d'habitude.

En voyant à la télévision la malheureuse fille du Président McCarthy assaillie par Norbert Bryant, le Sénateur Glassberg, de son canapé, lui envoya par SMS : "Oh, et salue bien notre ami Norbert de ma part ! 😵" - ces emojis n'étaient décidément pas son point fort.

Le futur Secrétaire à la Sécurité Territoriale, Dave Leon Clement, arriva à l'investiture avec un peu plus de retard que les autres Secrétaires nominés.

Vêtu de son plus beau costume bleu sombre d'un grand magasin sealandais que lui avait recommandé le Sénateur Astor - le jeune évidemment, pas le gâteux - il s'avança la tête haute, conscient de faire partie pour une fois des invités de marque à cette cérémonie. Il s'était fait accompagnée de sa blonde du moment - ce qu'il essayait de faire croire du moins, puisque c'était en réalité sa meilleure amie homosexuelle. On lui avait recommandé avant la cérémonie d'éviter de s'y présenter seul, et surtout d'avoir quelqu'un avec soit pour avoir un échappatoire en cas d'assaut par un certain futur-ex-Secrétaire au Commerce.

Il prit place et entama une discussion avec les membres du Cabinet, même si ça ne semblait pas exactement tant naturel que ça. Il réalisa qu'il se sentait comme lors d'une rentrée universitaire : affecté à une nouvelle promo, dont il ne connaissait personne, à essayer de socialiser avec des inconnus pour ne pas rester le marginal du groupe pendant toute l'année. Il eut de la peine en réalisant à quel point il était le plus à gauche - et peut-être l'un des moins désirés de cette administration. "Bon, en tout cas, il y a Horner", se consola-t-il.

La Présidente Nancy Chapman fut annoncée sur la terrasse du Capitole, alors que celle-ci arrivait tout juste devant le couloir qu'il fallait traverser pour accéder à la tribune d'honneur.
Ce n'était pas la première fois qu'elle allait traverser ce couloir. Ce serait la dernière en tant que femme importante, et encore, elle n'était désormais plus le centre de l'attention. Cette pièce serait la dernière qu'elle traverserait avant de mettre fin à ses fonctions de Présidente de la Fédération-Unie.
Cette fois-ci, elle laissa de côté son pas habituellement assuré - un pas qui, elle s'en rendait bien compte, était finalement réservé aux fois où elle s'impatientait pour son investiture. Elle était vêtu de sa belle robe rouge, qu'elle avait porté le jour de sa première investiture, avec les mêmes bijoux que ce jour-là. En voyant son reflet dans la vitre d'une peinture, elle voyait la même silhouette que celle de cette femme un peu plus jeune qui avait marché le long de ce couloir lorsqu'elle devenait la femme la plus puissante du monde. Elle marcha lentement, en profitant pour discuter avec ses deux enfants sur ces tableaux qui étaient restés là depuis ces 8 dernières années. Son fils ria en lui faisant remarquer qu'elle ne parlait jamais autant que lorsqu'elle était stressée. Le stress n'était pas la seule chose qui l'agitait. La tristesse aussi, et la nostalgie de son début de mandat, lorsque le monde semblait lui tendre les bras. A présent, le monde, elle en avait vu tant, et elle y avait fait tant.

Les Marines de la garde d'honneur se mirent au garde à vous quand la Présidente franchit enfin la porte. Elle s'arrêta, et répondit par un salut militaire à ceux dont elle était encore pour quelques instants la Commander-in-chief. Elle salua la foule présente, mais cette fois-ci, s'abstint de discuter avec aucun d'entre eux. Pendant sa période de présidente lame duck, Nancy avait eu le temps de dire au revoir à ses camarades leaders du Parti Conservateur, à ses fidèles membres du Cabinet et à son staff, et elle voulait consacrer cette occasion à l'avenir.
Elle alla à la rencontre de James McCarthy, son ancien Président, son ancien employeur, son inspiration politique et de bien des manières, son mentor. Elle le salua affectueusement par une accolade. Ses deux enfants s'approchèrent de lui et lui firent la bise, tandis que Nancy félicitait Margaret sur son élégante tenue. Elle aperçut les vieillissants anciens Présidents et Vice-Présidents mais s'abstint de leur parler, préférant passer ce moment avec ses enfants - elle ne voulait pas l'admettre, mais c'était bien plus difficile qu'il n'y aurait paru de laisser le pouvoir ainsi après l'avoir exercé et incarné si longtemps. Elle laissa une place près d'elle pour le Vice-Président Caldwell. Lui comprendrait probablement mieux que quiconque ce qu'elle ressentait en cet instant.

Assise, le regard perdu dans l'horizon pas si lointain de Saint Paul - la ville n'a jamais eu le même genre de gratte-ciels imposants qui étaient présentes dans toutes les grandes villes du pays, il faut dire - elle croyait reconnaître près de la President's House l'un des camions qui transportait ses affaires vers la base militaire où elle serait expédiée par hélicoptère aussitôt la cérémonie terminée, et d'où elle retournerait à Orson, dans son bel État du Richmond. Elle versa une petite larme qu'elle fit immédiatement disparaître, en faisant mine de se retirer une poussière de l'oeil. Elle attendit ensuite patiemment que la star de la journée, celle qui allait enfin lui succéder, fasse sa grande apparition.

Le Vice-Président Caldwell avait longuement réfléchi à sa présence à la cérémonie d'investiture de deux personnes qu'il détestait au plus haut point, tant sur le plan personnel que politique. Sans compter la foule de supporters gauchistes venus assister à ce lamentable spectacle. Le pays allait basculer à gauche et lui devait y assister aux premières loges. Il avait toutes les raisons du monde de ne pas venir ; ce qui aurait été une première dans l'Histoire de la Fédération-Unie et ce qui aurait fait également beaucoup parlé de lui. Seulement, quelque chose le bloquait. Il ne pouvait concevoir son absence par respect pour la Présidente Chapman, qu'il appréciait énormément. C'est donc pour cette seule et unique raison qu'il se fit violence afin de venir assister à la cérémonie d'investiture de Jenny Howard et Andrew Murphy.

A son arrivée aux côtés de celle que l'on pouvait désormais appeler "Second Lady" depuis leur mariage en août de l'année précédente, quelques partisans de la Présidente-élue Howard se mit à le huer copieusement tandis que d'autres préférèrent l'accueillir en scandant le nom de leur championne. Ethan s'attendait à ce genre de réaction et resta de marbre en maintenant son faux sourire de circonstance. Il envoya un baiser à la foule histoire de leur dire "je vous emmerde" en toute politesse. Il se tourna vers son épouse pour s'adresser à elle.

Mais quelle bande de crétins décérébrés.

Louise, quelque peu mal à l'aise, lui caressa la main pour le calmer. Elle savait qu'intérieurement, son époux bouillonnait.

Le couple Vice-Présidentiel descendit les marches tout en saluant quelques invités, uniquement conservateurs. Aucun progressiste ne semblait vouloir saluer le Vice-Président et ce dernier ne voulait en saluer aucun. Cette situation lui convenait donc parfaitement. Il prit le temps d'aller saluer le candidat malheureux à la présidence, Arthur Baker, qui puait l'alcool à plein nez. Ethan eut un peu pitié de lui et ne tarda donc pas à poursuivre son chemin pour aller saluer le Gouverneur George Harris, le Gouverneur-élu Warren Wood ou encore le Représentant Bob L. Ancelet. Une fois en bas des marches, il alla à la rencontre de l'ancien Président McCarthy et de son épouse.

Monsieur le Président, c'est toujours un plaisir de vous voir. Comment allez-vous ?

Les deux hommes discutèrent deux ou trois minutes puis Ethan se dirigea vers la Présidente Chapman. Lorsqu'il croisa son regard, il fut submergé d'une émotion qu'il ne pensait pas ressentir en ce jour. Il avait envie de pleurer. Il se contint afin de ne pas laisser transparaître ce qu'il considérait être une faiblesse. Une fois face à la Présidente, il la serra dans ses bras avant de s'adresser à elle.

Madame la Présidente. Nancy. Sachez que ce fut un véritable honneur pour moi de servir mon pays ainsi que votre administration en tant que Vice-Président. Jamais je n'oublierai ces huit dernières années. Jamais. Jamais je ne pourrai trouver de mots assez forts pour vous dire combien je vous suis reconnaissant pour votre confiance, pour votre gentillesse à mon égard et pour toutes les choses que vous m'avez appris. Je suis un autre homme aujourd'hui, grâce à vous.

Ethan, sentant à nouveau l'émotion le submerger, s'interrompit et adressa à la Présidente Chapman un sourire sincère, le seul de la journée. Il s'installa ensuite à sa place aux côtés de son épouse Louise qui elle, ne pu retenir quelques larmes. Le Vice-Président prenait conscience qu'il assistait là à ces derniers instants dans ses fonctions. Il regarda la foule massée sur l'esplanade, se retourna afin d'observer la tribune officielle puis posa les yeux sur le pupitre en face du premier rang. Il le fixa et se dit en son for intérieur qu'un jour, lui aussi viendrait prêter serment pour devenir Président de la Fédération-Unie. Il se jura de redresser le Parti Conservateur et d'écraser les progressistes comme jamais ils ne l'ont été. Les mâchoires serrés, il afficha un air déterminé et eut un petit sourire en coin. Son épouse lui demanda pourquoi il souriait et il lui répondit :

La prochaine fois que tu me verras ici chérie, ce sera pour prêter serment après mon Vice-Président, mark my words.

Sur ces paroles, il fixa l'horizon avec un air narquois.

Le Vice-Président-élu Murphy et son épouse Lauren arrivèrent en compagnie de leur trois grands enfants sous les applaudissements de la foule et de la tribune officielle. Andrew salua les partisans progressistes présents sur l'esplanade en face du Capitole puis descendit les marches en tenant son épouse par la taille. Il serra toutes les mains qui se présentaient à lui et échangea brièvement avec quelques-uns. Il s'attarda néanmoins avec les Gouverneures Melanie Barton, Elizabeth Grant Rutherford et Carrie Owen avant de partir à la rencontre des Présidents et Vice-Présidents au premier rang de la tribune. Ils les salua tous, y compris celui qui serrait dans moins d'une heure son prédécesseur et qui avait pris un malin plaisir à lui broyer la main en la serrant. Andrew se tourna ensuite vers son épouse pour lui indiquer où ils devaient s'asseoir.

Plus les minutes défilèrent, plus Andrew s'impatientait de prêter serment pour devenir le prochain Vice-Président de la Fédération-Unie. Une pointe de stress se faisait également sentir mais fut rapidement éclipsé par l'émotion qu'il ressentit lorsque fut enfin annoncé le nom tant attendu de la Présidente-élue, Jenny Howard.

La Présidente-élue Jenny Howard était extrêmement stressée. Certes, elle accédait enfin à la Présidence, pas moins de 16 ans après sa première campagne présidentielle, à l’époque sous les couleurs d’un tiers parti sans ambition ni chance de victoire. À l’époque, jamais Jenny Howard n’aurait pu croire gagner un mandat fédéral, et encore moins une élection présidentielle. Et puis tout s’était enchaîné, elle avait rejoint les progressistes, remporté une primaire dans une forme de hold-up historique puis pris une défaite retentissante qui aurait sonné le glas de n’importe quelle carrière politique. Pas la sienne. Elle était maintenant là, avec une victoire écrasante que ses prédécesseurs directs n’avaient pas eu. Et déjà, sa Présidence s’annonçait historique, au vu de la composition de son Cabinet qui allait rassembler autour d’une même table le leader de l’aile gauche progressiste Dave Leon Clement et la conservatrice Meghan McCarthy. Décidément, Jenny Howard n’allait rien faire dans sa carrière politique comme les autres.

Elle était arrivée au Capitole bien avant le début de la cérémonie, accompagnée de son mari. Mais avant de rejoindre la plateforme où se déroulerait la cérémonie, la Présidente-élue avait été faire un dernier tour dans son bureau au Sénat, déjà vidé et prêt à accueillir son successeur. Elle y resta de longs instants avec son mari, comme pour profiter de ces derniers moments de calme avant 4 (ou 8) ans qui s’annonçaient éreintants. Alors que l’heure de la cérémonie approchait, la Présidente-élue fut invitée à prendre le chemin de la cérémonie.

Marchant main dans la main avec son époux, elle bavarda longuement avec ce-dernier, jusqu’à arriver dans ce couloir qui menait à la plateforme. Là elle se figea presque, réalisant qu’il s’agissait de la dernière ligne droite, aussi du dernier couloir qu’elle empruntait en tant que Sénatrice. Elle descendit doucement les marches puis traversa le long couloir sans prononcer le moindre mot. C’est là que les caméras du pays la virent pour la première fois de la journée. Ils découvrirent son tailleur blanc surplombé de son manteau de la même couleur. Ils découvrirent aussi la tenue du futur First Gentleman et son manteau sur lequel la Présidente-élue avait des réserves qu’elle n’avait pas osé émettre pour ne pas gâcher cette belle journée qui s’annonçait. Les caméras du pays et du monde suivirent la Présidente-élue jusqu’à la porte qui donnait sur l’extérieur, bien gardé par deux Marines. Pendant qu’Isaac Delfrous admirait ce qu’il voyait autour de lui, lui qui vivait sa première investiture présidentielle, la Présidente-élue fixa cette porte, la dernière qu’elle franchirait en tant que Sénatrice et la première que, quelques minutes plus tard, elle franchirait en tant que Présidente. Tout se mélangeait un peu dans sa tête : l’Histoire qu’elle écrivait en venant ajouter son nom à la liste des 41 Chefs d’États de la plus grande nation du monde, la peur peut-être de ne pas être à la hauteur, la détermination à servir son pays.

Heureusement, cette confusion ne dura pas, interrompue par l’ouverture de la double porte par les deux Marines que, dans ses pensées, la Présidente ignora complètement. Dès qu’elle fit le premier pas vers l’extérieur, elle afficha un large sourire pour les caméras du monde entier. Elle commença à saluer des invités tous azimuts qui se trouvaient au bord de l’allée qu’elle empruntait. Des Représentants, des Sénateurs, quelques diplomates aussi, tous furent salués par la Présidente-élue. Elle fit un petit détour pour saluer celui (enfin c’était loin d’être le seul mais c’était en tout cas celui qui en fut le plus près) qui aurait voulu être à sa place aujourd’hui, son ancien adversaire conservateur Arthur Baker. Elle salua la femme et les enfants de ce dernier avant de gratifier son ancien adversaire d’une poignée de main et de quelques remerciements pour sa présence à cette cérémonie.

La Présidente-élue continua son chemin et s’arrêta saluer les trois Gouverneures progressistes du Nord-Ouest du pays, dont l’une allait entrer dans son Cabinet. Elle continua ensuite son chemin, s’arrêtant juste saluer le Leader de la Minorité à la Chambre et ancien colistier du ticket conservateur, Bob L. Ancelet. Elle arriva ensuite au premier rang. Elle salua alors d’abord sa fille, Jane Howard qu’elle enlaça devant les caméras du monde entier. Elle salua ensuite son frère Francis, avocat, qui avait fait le déplacement pour assister à l’investiture de sa grande soeur. Même si ils ne se voyaient presque jamais, ils gardaient une immense affection l’un pour l’autre.

Jenny Howard se dirigea ensuite vers le rang des anciens Présidents et Vice-Présidents. Elle salua longuement la Présidente Chapman qu’elle remercia une nouvelle fois pour la qualité de la transition, même si elle avait déjà eu l’occasion de le faire lors de leurs nombreuses rencontres post-électorales. Elle se dirigea ensuite vers le Vice-Président Caldwell. Elle se souvenait très bien de l’attitude narquoise de ce dernier quatre ans plus tôt, lors de cette même cérémonie. Elle avait longuement, avant la cérémonie, hésité à sortir une vacherie, comme de souhaiter bon courage à sa nouvelle femme pour leur vie à deux. Mais, se rappelant la laideur du manteau choisi par son époux, elle préféra se contenter d’un respectueux « Monsieur le Vice-Président » à Ethan Caldwell puis de saluer d’un « Madame la Second Lady » son épouse. Elle se dirigea ensuite vers le couple McCarthy qu’elle salua avec un immense respect, tout en échangeant quelque mot avec le « Vieux lion » au sujet de sa fille qui s’apprêtait à devenir Secrétaire d’État. Elle salua le couple Reid avant d’aller saluer Chelsea Campbell et son époux John. Ce n’était un mystère pour personne que Jenny Howard était la première des admiratrices de la première Présidente de l’Histoire. Jamais en faisant campagne pour elle 25 ans plus tôt, elle n’aurait pu imaginer être dans cette position, à quelques minutes de prêter serment pour devenir l’une de ses successeures. Elle alla ensuite saluer respectueusement le Vice-Président Gonzales, le Vice-Président Allen et le Président Edwards, vers qui elle s’arrêta un peu plus longtemps. Elle revint ensuite se placer aux côtés de son Vice-Président à venir qu’elle enlaça avant de saluer son épouse. Elle attendit, aux côtés de son époux, l’arrivée de la Juge-en-Chef, tout en regardant avec un large sourire la foule venue assister à cette investiture.

La totalité des invités étaient arrivés à la cérémonie d'investiture de la 42e Présidente et du 48e Vice-Président de la Fédération-Unie. Pour la troisième fois de l'histoire de la Fédération-Unie, une femme allait présider la première puissance mondiale. La personnalité la plus attendue de toutes, la Présidente élue Jenny Howard, fut la dernière à prendre place, comme le veut la tradition. Devant le Capitole, la foule attendait le début de la cérémonie avec impatience. La Juge-en-cheffe de la Cour Suprême fit alors son apparition dans sa tenue de cérémonie sous les coups de 11h50, dix minutes avant la prestation de serment de la Présidente. Elle se dirigea vers la tribune suivi de ses assesseurs qui prirent place à leurs sièges respectifs. La cérémonie commença sous les applaudissements et les cris des supporters de Jenny Howard.

Une fois arrivée près du pupitre, Christy serra la main du Vice-Président élu Murphy ainsi que celle de la Présidente élue Jenny Howard, tandis qu'un de ses assesseurs lui apporta la première Constitution de la Fédération-Unie, écrit de la main des révolutionnaires ayant fondé la Fédération-Unie, utilisé spécialement pour ce genre de grandes occasions. Elle attendit que le couple vice-présidentiel prenne place pour le moment tant attendu de l'investiture. Elle donna le précieux exemplaire de la Constitution rédigé par les Pères Fondateurs à la femme du futur Vice-Président, et s'adressa à lui :

Monsieur le Vice-Président-élu, si vous le voulez bien, posez votre main gauche sur la Constitution, levez votre main droite, et répétez après moi le serment d'office.

Elle lui montra l'exemple et leva elle aussi sa main droite, attendant que celui-ci se mette en position de prononcer le serment.

"Moi, Andrew Robert Francis Murphy, jure solennellement que je défendrais la Constitution de la Fédération-Unie contre tous ses ennemis, de l'extérieur et de l'intérieur, que je dévouerai ma foi et mon allégeance en celle-ci, et que je prends cet engagement librement, sans aucune réserve ou volonté de m'y soustraire, et que je m'acquitterai loyalement et au meilleur de mes capacités des devoirs de la charge que je m'apprête à prendre."

Andrew posa sa main gauche sur la Constitution, leva sa main droite et répéta son serment d'office.

Moi, Andrew Robert Francis Murphy, jure solennellement que je défendrais la Constitution de la Fédération-Unie contre tous ses ennemis, de l'extérieur et de l'intérieur, que je dévouerai ma foi et mon allégeance en celle-ci, et que je prends cet engagement librement, sans aucune réserve ou volonté de m'y soustraire, et que je m'acquitterai loyalement et au meilleur de mes capacités des devoirs de la charge que je m'apprête à prendre.

Félicitations, Monsieur le Vice-Président.

Elle lui serra la main, puis reprit la Constitution des mains de sa femme. Cette fois-ci, au tour de la prochaine dirigeante du monde libre. De la même manière, elle donna l'exemplaire de la Constitution à l'époux de Jenny Howard. La Juge-en-cheffe de la Cour Suprême s'adressa à celle qui était sur le point de devenir la 42ème Présidente de la Fédération-Unie.

Madame la Présidente-élue, à votre tour, si vous le voulez bien, posez votre main gauche sur la Constitution, levez votre main droite, et répétez après moi le serment d'office.

Elle leva sa main droite, et attendit que la Présidente-élue en fasse de même et se tienne prêt à prêter serment.

"Moi, Jenny Diane Howard jure solennellement que je remplirai fidèlement les fonctions de présidente de la Fédération-Unie et, que dans toute la mesure de mes moyens, je sauvegarderai, protégerai et défendrai la Constitution de la Fédération-Unie."

Fédération-Unie

[4 avril 192 - Inauguration Day] Investiture de Jenny Howard & Andrew Murphy

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