ven. 14 mai 2021 23:46
Dans les derniers jours du mois d'avril, le Speaker de la Chambre avait pris contact avec l'entrepreneur riversien et l'avait invité à venir dîner chez lui en cette soirée du vendredi. Quelques jours après l'annonce de son retrait et alors que les spéculations allaient bon train sur sa possible candidature en 191, le Speaker recevait seul Henry Murray, même leurs femmes n'avaient pas assisté à la rencontre.
La voiture avec chauffeur d'Henry Murray arriva dans la cour de la résidence du Speaker arriva à 19h30, quelques minutes après que ce-dernier, revenu dans l'après-midi de St. Paul, ait reçu le traiteur qui avait préparé le repas, copieux vu combien l'appétit d'Henry Murray (que quelques mauvaises langues surnommaient Burger) faisait l'objet d'intenses spéculations.
Bonsoir Monsieur Murray ! Soyez le bienvenu.
Merci à vous Monsieur le Speaker !
Vous m'envoyez du "Monsieur le Speaker", je vous croyais plus anti-élites que ça !
J'ai voulu devenir Président. Si je l'avais été, j'aurais aimé que l'on m'appelle par mon titre.
Devenir Président? Je crois que nous allons beaucoup en parler ce soir ! Mais par pitié, appelez-moi Steve ! Nous rentrons ?
Les deux hommes rentrèrent dans la pièce à vivre et s'installèrent directement autour de la table où deux bouteilles attendaient, dont l'une en provenance d'une production viticole possédée par l'entreprise d'Henry. Ce-dernier désigna la bouteille.
Non mais vous savez que c'est une piquette dégueulasse? Vous avez une réputation d'aimer le bon vin, pas ce genre de vins clairement indigne du troisième personnage de la première puissance mondiale.
Je n'y ai jamais goûté. Mais en l'achetant, je vous donne de l'argent et finance partiellement votre campagne.
Ma campagne ? Je n'ai jamais rien annoncé et je n'ai pas eu vent de rumeurs à mon sujet.
Je n'ai rien entendu sur vous, pas d'inquiétudes. Mais je je n'ai pas demandé à ma femme de passer la soirée chez sa soeur et de nous laisser seul pour parler boissons. Je veux que vous vous présentiez.
Alors ça ! Vous, la définition même de l'élite, élu depuis 20 ans au Congrès au point de devenir le chef des conservateurs à la Chambre, qui me demande à moi, entrepreneur qui a proposé un ouragan sur notre capitale, de se présenter.
Ne faites pas comme ci vous étiez si anti-système que ça. Vous m'avez appelé "Monsieur le Speaker" en arrivant et vous savez que vous avez besoin des réseaux traditionnels de financement pour gagner les primaires. Et si vous étiez amené à gagner, vous seriez le premier à faire appel au Congrès pour passer vos justes et ambitieuses réformes. Je me fiche complètement que vous passiez la journée à insulter le Congrès si vous devenez Président et appliquez vos idées conservatrices.
Mais pourquoi moi? Les prétendants à la succession de Chapman ne doivent pas manquer ! Et si vous voulez un fort en gueule, cherchez du côté de la Vice-Présidence.
Ethan Caldwell? Un fort en gueule ça c'est certain. Mais l'agenda qui est le sien est tout aussi modéré et inefficace que les Présidents McCarthy et Chapman. Nous avons besoin d'un conservateur radical, capable de gagner les primaires puis l'élection sur cette ligne.
Vous avez soutenu Chapman le lendemain de son annonce de candidature en 183, alors même que vous montiez dans les sondages et aviez une chance de remporter la nomination.
James McCarthy était adulé par les conservateurs, Chapman devenait la favorite incontestable des primaires. J'ai fait un pari et je suis aujourd'hui le deuxième dans l'ordre de succession présidentielle, on a fait pire comme pari. Mais cela ne m'empêche pas de vouloir voir un vrai conservateur gouverner avec un Congrès réellement à droite.
Cela ne m'explique toujours pas pourquoi vous voulez que je me présente. Des conservateurs réels qui n'ont pas leur langue dans leur poche, ça existe, à commencer par vous !
Mais vous avez un potentiel énorme. En défiant une Présidente sortante, vous avez obtenu 1,9 millions de voix pour la Présidence. Vous êtes connus, vous faites du bruit tout en affirmant des valeurs qui plaisent à la base et vous pouvez amener des voix de personnes traditionnellement absentes de nos élections. Et surtout, nous avons besoin de quelqu'un d'atypique. Il y aura probablement en face un candidat inédit, que ce soit Carrie Owen, Pete Page ou qui sais-je qui soit vecteur d'un aspect historique. Nous devons leur opposer une candidature inédite également, celle d'un entrepreneur qui n'a pas peur de défier l'establishment.
Et vous? Quel est votre intérêt à être devant moi à me demander de me lancer dans cette course? Que cherchez-vous à obtenir de moi?
Le Département d'État.
Vous n'y allez pas de main morte ! Pourquoi devrais-je dire oui ?
Henry, réfléchissez deux minutes. Pendant votre campagne, pour gagner la nomination, vous devrez convaincre le noyau dur conservateur que vous irez en 4 ou 8 ans plus loin que vos deux prédécesseurs en 16 ans. Et pour cela, vous devrez attaquer avec plus ou moins de verve le Congrès et les élus conservateurs, trop mous. Sauf qu'une fois élu, vous aurez besoin d'eux pour appliquer votre politique ambitieuse et il vous faudra rassurer l'establishment et accessoirement les marchés, qui voudront s'assurer que vous serez entourés de personnes d'expérience. Et franchement, avec 9 mandats au Congrès, je pense avoir de l'expérience et ne pas constituer un choix affreux non plus. J'ai énormément à vous offrir, bien plus que vous ne voulez bien l'admettre.
Bien que ce soit purement hypothétique, admettons que je vous dise oui, que m'offrez-vous?
Vous voulez dire en plus du soutien du Speaker de la Chambre des Représentants de la Fédération-Unie, dont l'action politique est saluée par beaucoup de constantins conservateurs et de tous ceux qui s'opposent au big government ? Je vous offre un carnet d'adresses. Car même si beaucoup de collègues refuseront de vous soutenir publiquement, ils ont des fonds de comités d'action politique et des relations. Vous ne gagnerez pas sans. Vous pouvez dire tout ce que vous voulez contre le système, il est solide et vous résistera.
Voilà qui donne matière à réflexion.
On passe à table?
Les deux hommes entamèrent l'entrée, déjà copieuse puis continuèrent le repas, tout en s'éloignant de plus en plus du sujet initial, divaguant du déménagement d'Henry Murray à Louisville au travail des conservateurs de la Chambre. Deux heures plus tard, les deux hommes se levèrent et se dirigèrent vers l'entrée pour s'échanger quelques mots avant le départ de l'entrepreneur riversien.
Merci pour tout Steve, ce fut un plaisir.
C'est moi qui vous remercie. Nous nous reverrons après les midterms, nous aurons encore beaucoup à nous dire.
En effet ! Bon, saluez Martina pour moi.
Je n'y manquerai pas. Faites de même avec Macey !
Au revoir Steve !
Les deux hommes s'échangèrent une poignée de main et Henry regagna sa voiture tandis que le Speaker fermait sa porte pour aller se coucher après une longue semaine de travail au Capitole.