Je suis fort amusé de constater que la critique humoristique du clip de campagne de Stanley Graham ne fasse sortir notre cher ancien magistrat fédéral de ces gonds, lui faisant enfoncer la porte des habituels sophismes conservateurs. Il prétend que je l’insulte en le qualifiant de « cow-boy », car cela reviendrait à décrire un plouc arriéré des campagnes: pourtant, je me référais à la vision littérale d’un cow-boy, c’est à dire un homme chargé de conduire les troupeaux de bestiaux dans notre Fédération au coeur des années 40, soit il y a près de 150 ans. Mr Graham prétends parler au nom du pays profond dans ses clips de campagnes: mais il dépeint des terres rurales idéalisées, qui n’existent plus depuis près d’un siècle. Nos campagnes ont connu des mutations profondes, et ont dépassé l’âge d’or des cowboy virils, des saloons et des duels au pistolet: reconnaitre ces évolutions n’est nullement mépriser les terres rurales de la Fédération Unie: c’est au contraire connaître ce qu’elles sont.
Etant moi même né dans une zone rurale, j’ai eu connaissance, bien que ces informations sur mon passé soit peu connues et je l’admet moi-même, avoir été discret sur mes propres origines avant cette campagne, de ces maux dont souffres la Fédération que vous décrivez comme profonde. Si la mention des déserts du Far West lui fais penser à une attaque envers les ruraux de notre pays, c’est Stanley Graham qui possède je pense le plus cruel mépris de nos habitants non-urbains. Hors des villes, les souffrances causées par le manque de services publics, la libre circulation des drogues, le fléau de l’alcoolisme, le manque d’infrastructures médicales, l’absence de perspective économique en dehors du secteur agricole, les logements insalubres: autant de maux dont ne parlent guère le candidat conservateur. Mais aussi la richesse des sociabilités traditionnelles, l’entraide, la vie en petites communautés, le contact de la nature, le savoir faire manuel, la résilience: autant de qualité qui vont bien au delà de la virilité ancienne exaltée par le clip de campagne de Stanley Graham et qui correspondent bien mieux à la réalité de nos campagnes.
Oui, j’estime être au coeur de la vie quotidienne de mes concitoyens entre le rayon fruit et légume d’un supermarché FedMart, comme dans un train rural, sur les traces d’un quartier isolé, dans les plaines des campagnes d’Arcadia. Bien plus que dans les centres de tirs ou les ritournelles des anti-avortements, ces valeurs quotidiennes sont au coeur de la vie des fédérés. Le mépris des élites de Saint-Paul, progressistes comme conservatrices, a effectivement nuit à de nombreux de nos concitoyens ruraux: mais si nous prétendons parler en leur nom, écoutons les sans les caricaturer.